Il y a un éléphant dans la pièce

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La politique de la gestion des déchets est un sujet chaud en ce moment alors que diverses provinces se débattent avec l\’introduction ou la modification de ce qu\’elles appellent la « responsabilité élargie des producteurs », ou les programmes de REP, au sujet du papier imprimé et de l\’emballage résidentiels.  Le véritable éléphant dans la pièce, toutefois, est le rôle futur des municipalités dans la gestion de la collecte sélective.

Selon notre point de vue, il y a deux éléments clés à aborder dans ce débat continu parfois rancunier.   Le premier est : Qui est le chauffeur de la Boîte bleue?  C\’est un enjeu de contrôle.  Nous suspectons que certains militeraient contre le fait que ce soient les provinces qui établissent les “règles de route” compte tenu que la gestion des déchets solides est clairement une juridiction provinciale.  Cela signifie de décider du cadre d\’application, de la politique et de la gestion de la performance.

Le “chauffeur”, dans cette analogie quelque peu imparfaite, ce devraient être les « producteurs »  compte tenu que ce sont ceux qui ont le plus d\’impact sur la conception des matières qui aboutissent dans les foyers canadiens, et que c\’est à eux qu\’est, ou a été, confiée la responsabilité (financière et/ou opérationnelle).  Et nous ne devrions pas oublier que les producteurs sont pour une grande part des apprentis chauffeurs qui doivent composer avec les problèmes de conception matérielle et en même temps éviter sur leur chemin les diverses embûches et surfaces meubles de la bonne intendance de l\’environnement.

Le reste d\’entre nous (municipalités, recycleurs, transformateurs, fournisseurs de matières et consommateurs) sommes en général des “passagers”, d\’une manière ou d\’une autre, se bousculant parfois pour se rapprocher du volant en suggérant différentes façons d\’atteindre “nos objectifs”.

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Ce dont nous sommes témoins au Canada en ce moment est la dynamique en plein changement et la tension entre ces différents intervenants alors que le pays fait la transition vers un financement complet ou partiel des programmes de collecte sélective.  Les “Producteurs” résistent, et à bon droit, à signer des chèques en blanc pour quelque chose sur lequel ils ont peu ou pas de contrôle du tout.  Puisque que ce sont eux qui paient la note de transport jusqu\’à 100 p. 100, ils veulent s\’assurer que le système de collecte sélective soit le plus efficace possible.  À son crédit, la Colombie-Britannique a permis aux producteurs de concevoir un programme qui semble être de loin plus complet, efficace et efficient (les mêmes matières partout dans la province) que le programme actuel.  La C.-B. a établi le cadre d\’application et s\’est tenue à l\’écart en faisant en sorte que la REP se concrétise : elle a permis aux producteurs d\’être les chauffeurs du camion de Boîte bleue, en autant qu\’ils observent les  “règles de la route”.

L\’Ontario, quant à elle, avec le projet de loi 91, la Loi sur la réduction des déchets, a délibérément tendu les clés aux municipalités.  En Ontario, les producteurs actuellement ne contrôlent pas quelles sont les matières  ramassées et doivent attendre et faire du lobbyisme auprès de 200 municipalités différentes s\’ils veulent ajouter quelque chose de nouveau.  Les producteurs ne contrôlent pas non plus la façon dont les matières sont ramassées (boîtes, bacs roulants, sacs, à deux flux ou à flux unique, sur base hebdomadaire ou à la quinzaine, ou en alternance hebdomadaire) ni la façon dont elles sont traitées.  Ni ne contrôlent-ils les messages éducatifs requis pour encourager un meilleur recyclage.  Par contre, ils paient effectivement  (en vertu du projet de loi 91) jusqu\’à 100 p. 100 des coûts nets du programme!  Ce n\’est rien de moins qu\’une manœuvre frauduleuse de « taxation sans représentation » déguisée qui se prête aux exigences des intérêts municipaux.  C\’est une perversion des principes de la REP parce qu\’elle impose une responsabilité financière sur les producteurs en leur donnant peu ou aucun contrôle sur les coûts.

Cela ne veut pas dire que certaines municipalités n\’ont pas fait du bon travail.  Plusieurs ont fait leurs devoirs.  Et les gouvernements locaux ont clairement, et continueront d\’avoir, un rôle dans la gestion de la collecte sélective.   Mais ce devrait être un rôle réduit, si tant est que la REP soit un outil de politique publique efficace.  Les municipalités devraient être des passagers comme le reste d\’entre nous, et non les chauffeurs du camion.  Certaines d\’entre elles pourraient en arriver à ramasser ou à faire le traitement des matières recyclables de collecte collective, mais elles devraient être autorisées à le faire, selon notre point de vue, seulement  lorsqu\’elles ont remporté une soumission de contrat en concurrence équitable avec les fournisseurs de services du secteur privé.

La question sous-jacente ici est de savoir si les gouvernements locaux devraient s\’impliquer dans le traitement et la vente de produits sur les marchés mondiaux au comptant avec les dollars des contribuables.  Est-ce réellement le rôle d\’un gouvernement local, en particulier alors que les producteurs sont réglementés pour payer de plus en plus les coûts financiers et d\’exploitation des collectes collectives?  L\’argument à l\’effet que l\’argent des contribuables déjà investi dans l\’équipement de collecte et de traitement sera gaspillé si on refuse aux municipalités un rôle de leader est pour le moins orienté à faux.  L\’équipement de centre de tri de matières recyclables a une durée de vie de possiblement 10 années, les véhicules de collecte, peut-être sept, après quoi on doit les remplacer.  Il doit clairement y avoir une période de transition pour que les gouvernements locaux s\’ajustent à leur nouveau rôle de moindre importance.

Ce qui nous amène au deuxième élément clé qui doit être pris en considération dans ce débat : Comment mieux réaliser des économies d\’échelle?  Le fait est que le recyclage des matières est principalement une activité industrielle et non une activité municipale.  Le programme Boîte bleue ontarien, le plus important de la province, ne fournit que 5 p. 100 du tonnage total du papier recyclé en Ontario.  Si nous nous limitons à l\’emballage à lui seul, plus de 60 p. 100 (principalement des boîtes de carton ondulé usagées) est envoyé au recyclage par l\’industrie ontarienne, pas par les gouvernements locaux.  Pour y arriver, le secteur privé a un long historique de construction de stations de transfert et de centres de tri de matières recyclables.  Il y a des économies d\’échelle à faire en modifiant des centres de tri de matières recyclables qui existent déjà pour accepter la collecte collective des matières.  Plusieurs l\’ont déjà fait.

Alors, une question clé que les décideurs du gouvernement et les producteurs réglementés en vertu des dispositions de la REP se doivent de prendre en considération est de savoir si oui ou non les municipalités devraient réellement être impliquées dans le traitement des matières de collecte collective.  Étant donné que la majeure partie du papier imprimé et des emballages est déjà traitée par les centres de tri de matières recyclables du secteur privé, pourquoi aurions-nous besoin de centres municipaux tout à fait nouveaux, financés par les dollars des contribuables, qui seraient plus tard remboursés par les producteurs en vertu de quelque manœuvre de REP?  Ça n\’a pas beaucoup de sens, ni sur le plan environnemental ni sur le plan économique.

Nous nous apprêtons à avoir des moments et des combats intéressants dans l\’avenir.  Demeurez à l\’écoute!

John Mullinder

Executive Director Paper & Paperboard Packaging Environmental Council (PPEC)
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